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3/11/09

L'INDE TENTÉE D'ASSOUPLIR SA POSITION SUR LE CLIMAT




LE MONDE

New Delhi Envoyé spécial


L'Inde serait-elle en train de modifier sa position à quelques semaines de la conférence sur le climat de Copenhague ? Le 19 octobre, Le Times of India révélait que le ministre de l'environnement, Jairam Ramesh, avait écrit au premier ministre une lettre dans laquelle il proposait d'assouplir la position du pays dans la négociation. New Delhi pourrait, suggérait-il, cesser d'insister sur le maintien du protocole de Kyoto, accepter des engagements de réduction de ses émissions, et être plus souple en ce qui concerne les transferts financiers depuis les pays du Nord.

L'article a immédiatement suscité une levée de boucliers. Les organisations écologistes mais aussi tous les principaux partis se sont indignés de ce signe d'une évolution de la position, jusque-là, intransigeante de l'Inde. Dès le lendemain, le ministre de l'environnement publiait un démenti. Cela n'a pas suffi à éteindre la polémique, qui a suscité de nombreux articles et des débats à la télévision. Quelques jours plus tard, le premier ministre, Manmohan Singh, indiquait que la position de l'Inde ne changerait pas.

Cependant, l'épisode révèle que l'attitude du gouvernement indien n'est plus aussi rigide qu'auparavant. Depuis le début des négociations sur le climat, New Delhi proclame que les pays riches, qui ont la plus grande responsabilité historique dans l'accroissement de l'effet de serre, doivent réduire fortement leurs émissions et transférer des technologies propres aux pays pauvres. Le développement des pays émergents, comme l'Inde, ne devrait pas être contraint par de nouvelles règles sur leurs émissions de gaz à effet de serre.

Mais le rapprochement diplomatique opéré depuis plusieurs années entre l'Inde et les Etats-Unis change la donne : "Sur le terrain international, l'Inde essaye de coller aux positions américaines dans tous les domaines, observe l'écologiste Raman Mehta, du bureau indien du Réseau d'action climat. Il n'y a que sur la question du climat qu'ils sont opposés. Il est possible que le gouvernement soit sous la pression des Etats-Unis pour assouplir sa position." Nurita Sarain, directrice du Centre pour la science et l'environnement et membre du conseil du premier ministre sur le changement climatique, confirme : "Un groupe de pression, puissant au sein du gouvernement, estime qu'il faut être pragmatique et flexible afin d'obtenir un accord à Copenhague. Mais la vigueur de l'opposition montre qu'il y a un sentiment très fort dans l'opinion pour refuser cette évolution."

Les Indiens et, officiellement, leur gouvernement, observent en effet qu'ils ont un taux d'émission de gaz à effet parmi les plus faibles du monde : 1,1 tonne annuelle de dioxyde de carbone (en 2005), contre plus de 20 tonnes par habitant des Etats-Unis. De surcroît, l'Inde reste encore un pays très pauvre : "900 millions d'habitants y vivent avec moins de 2 dollars par jour, selon la Banque mondiale", rappelle Raman Mehta.

Pour sortir ces foules immenses de la misère, le développement est jugé absolument nécessaire ; il impliquera un accroissement des émissions du pays, surtout en l'absence de transferts de technologie de la part des pays du Nord.

Enfin, l'Inde ne reste pas l'arme au pied devant le changement climatique, dont les signes sont de plus en plus visibles, à commencer par les irrégularités de la mousson, très mauvaise cette année.

"Nous dépensons déjà chaque année plus de 25 milliards de dollars pour répondre à la variabilité climatique", indique Prodipto Gosh, membre de l'équipe de négociation indienne lors des conférences sur le climat. "Et nous avons engagé un plan national sur le changement climatique, qui organise les politiques pour une agriculture soutenable, la conservation des ressources en eau, la préservation de l'écosystème himalayen, mais aussi sur l'efficacité énergétique ou le développement de l'énergie solaire."

Officiellement, donc, l'Inde restera très exigeante à Copenhague, en décembre. "Notre mandat de négociation n'a pas changé d'une virgule", dit M. Gosh. Il reste à voir si, d'ici un mois et demi, le clan des "pragmatiques" ne relancera pas, plus ou moins discrètement, l'offensive.

Hervé Kempf

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